Vous voilà consultant en gestion du changement, fraichement débarqué dans une entreprise pour le déploiement d’un nouveau logiciel de gestion de données de style SAP. Dans notre jargon, le « ERP (Enterprise Resource Planning) » ou la solution pour simplifier les activités d’affaire a déjà été choisie. On vous fait rentrer dans la portion de l’évaluation de l’étendue du projet de transformation numérique. Avant la migration des données. Avant la personnalisation des nouvelles fonctionnalités ou des tests.
Votre client a déjà identifié des parties prenantes, cependant par expérience, on peut dire avec confiance que la liste n’est jamais complète. Comment donc, avant même de faire l’analyse d’impact, peut-on en tant que Conseiller en gestion du changement, identifier les parties prenantes manquantes ? Vers qui doit-on se tourner pour les angles morts ? Qui, dans l’entreprise que l’on ne connaît pas encore, peut devenir notre allié ? Quel outil pourrait nous guider dans l’ordre d’intervention des parties prenantes dans le ou les processus ? Dans ce billet de blogue, on tentera de vous donner des pistes de solutions qui nous ont bien aidé dans le passé pour identifier ces parties prenantes manquantes.
Sans pleinement comprendre l’industrie dans laquelle vous évoluez présentement, l’organigramme risque de vous aider à mieux comprendre les mécanismes et les processus existant en amont de cette nouvelle numérisation des tâches. S’en approprier en début de mandat, ça aide énormément à placer les pions. Les titres, les rôles et responsabilité vous donneront une longueur d’avance et vont vous pister dans l’assemblage du casse-tête qu’est celui d’identifier les parties prenantes qui risquent de vivre l’impact de la transformation numérique en cours.
Vous avez peut-être déjà accompagné un client dans un projet similaire ? Vous savez très bien que la mise en place de ce nouveau logiciel permettant d’automatiser certaines tâches ne sera pas uniquement bénéfique à l’équipe des achats ou des finances.
Votre expérience vous fait comprendre que le département de la Gestion des installations, par exemple, voudra avoir accès au nouveau système de livraison, pour vérifier la date d’arrivée des nouvelles ampoules pour les lampadaires devant les entrepôts aux opérations (et par le fait même contribuer à la sécurité de tous). Vous savez aussi que l’équipe des costumes de l’entreprise voudra suivre la trajectoire des matières premières commandées en outremer pour mieux planifier le prochain spectacle.
Sans forcément connaître l’industrie de votre nouveau client, vous comprenez l’ordre d’intervention de certains départements dans toutes les organisations. Tirez profit de cette expérience ou de votre flair et utilisez-le à bon escient. Si vous n’en êtes pas certains, posez des questions pour confirmer votre intuition.
Les premières prises de contact avec les parties prenantes déjà identifiées par vous et/ou votre client seront particulièrement révélatrices si elles sont bien conduites. Une entrevue armée d’une série de questions bien structurées pour annoncer le changement technologique et parler des prochaines étapes ou des impacts possibles, pour cette partie prenante, lui permettra inévitablement de vous communiquer des informations supplémentaires sur le processus.
Un entretien avec les ressources humaines vous fera comprendre qu’ils impliquent tout de suite les TI pour l’automatisation des rappels de messages de formations en ligne auprès des employés. Une discussion avec les finances permettra de saisir que le département légal est inévitablement impliqué en amont pour éviter les poursuites et justifier les frais en note de bas de page sur une facture avec certains fournisseurs. Toutes ces conversations nécessitent une écoute active pour capter ceux dont on n'avait pas tenu compte dans le suivi des processus.
Le courriel à tous, pour annoncer le changement à venir fait toujours sortir des placards des parties prenantes non identifiées. Si l’on envoie ce courriel d’annonce de transformation numérique suffisamment à l’avance et qu’il inclut avec transparence la notion que l’on cherche encore à identifier toutes les parties prenantes, il n’y a pas de honte à ce que certaines personnes lèvent la main. Cependant, si l’annonce se fait tardivement et que plusieurs réunions ont déjà été tenue sur le nouveau logiciel sans l’apport de certains départements clés de l’entreprise ; sachez qu’il sera alors plus difficile d’établir un engagement pour ce projet. En effet, ces groupes sentiront peut-être qu’ils ont été oubliés, donc non valorisés ou volontairement exclus. Prenez-vous donc suffisamment à l’avance pour lancer cette première communication de base de manière à bénéficier de ses retombées.
En dehors des TI, maîtres des dépendances techniques et des intégrations de systèmes, deux autres départements clés sont souvent d’une aide inestimable pour identifier les parties prenantes de l’entreprise impliqué dans un processus de transformation numérique.
Le département des communications, ou des affaires corporatives, est souvent le tout dernier maillon à être mis au parfum d’une initiative numérique. Ils ont donc adopté une certaine résilience pour faire face à de nombreux imprévus : connaître ses clients internes et leurs processus de façon à être informé en amont de ce qui s’en vient ! Faites-vous donc des amis au département de communication. En plus des canaux les plus appropriés pour votre projet, les membres de cette unité d’affaire se feront un plaisir de vous partager ce qu’ils savent et qui sera directement relié à votre transformation numérique.
Un autre département souvent sous-estimé, surtout pour prévenir le désengagement des troupes face à un changement d’une aussi grande envergure qu’est l’implantation d’un nouvel ERP : les syndicats. Bien évidemment, les syndicats ne font pas partie de la réalité de toutes les entreprises chez lesquelles il y a une intervention en gestion du changement. Et même lorsque c’est le cas, elles ne sont pas toujours des agents de changements positifs. Cependant, vous seriez surpris de voir qu’un certain nombre de syndicats ne vivent pas uniquement des rapports de force entre les employés qu’ils représentent et le patronat. Plusieurs se soucient sérieusement du bien-être des employés et ne demandent pas mieux que de faire partie de la conversation des changements à venir en amont. Ils seront trop heureux de partager les leçons apprises de ce qu’ils ont déjà vécu et par le fait même d’éviter certaines erreurs du passé. Et ça commence par l’identification complète de certaines parties prenantes inattendues !
Pour éviter donc les échéanciers qui n’en finissent plus, les budgets qui grossissent et un désengagement partiel lors d’un projet de transformation numérique, utilisez les techniques ci-haut mentionnées lors de votre dépistage de parties prenantes manquantes. Vous constaterez que la collaboration avec le premier lot de parties prenantes identifiées vous permettra d’en identifier d’autres (en plus de leurs perspectives et préoccupations sur le changement à venir). Cela vous aidera à mener l’adoption du projet du nouvel ERP à bon port, auprès de tous ceux concernés. Il n’y a rien comme une vue globale complète pour se diriger vers le succès de l’adhésion.
Fudjika Bloncourt
Conseillère sénior en communication et en gestion du changement